Alphonse Daudet et le monde méditerranéen

« L’idéal serait sans doute, comme les romanciers, de camper le personnage à notre gré, de ne jamais le perdre de vue, de rappeler sans cesse sa grande présence.
Malheureusement ou heureusement, notre métier n’a pas les admirables souplesses du roman. »

Fernand Braudel, La Méditerranée et le monde méditerranéen

C’est en ces termes que Fernand Braudel exprime sa passion pour la Méditerranée, mais reconnaît aussi la limite de son entreprise.

Comment Alphonse Daudet utilise-t-il « les admirables souplesses » de la littérature pour retracer les aventures de ce personnage qu’est le monde méditerranéen ? A l’occasion du 30° anniversaire du colloque des Amis d’Alphonse Daudet à Fontvieille, nous souhaitons aborder ce sujet central pour l’écrivain. 

Nous pourrons envisager successivement :

1.   La dimension biographique 

« Tout petit, je jouais à la marelle sous la porte d’Auguste, aux osselets dans les arènes et sur les marches du temple de Diane… » (Ultima) Il s’agira d’étudier le rôle de l’enfance, la place des souvenirs, l’importance de la famille, des voyages, des amis, des lieux qui ont marqué l’écrivain. Cette représentation du Midi est liée à une expérience personnelle de l’écrivain devenu parisien. Dans une vision diplopique, Daudet précise son identité et confronte, dans ses œuvres, le Nord et le Midi. 

2.     L’inspiration poétique : « Un minuscule cahier vert […] LE MIDI »

Le Midi est double : c’est une source d’inspiration poétique et ethnographique à la fois, l’objet d’une enquête sur le réel et le lieu de la rêverie.   
Le monde méditerranéen est un espace sensoriel, dont témoignent dans l’œuvre la place de la botanique, de l’eau (mer, lacs, étangs), l’importance des odeurs, des bruits, de la lumière. Daudet insiste sur la diversité de paysages ; des mœurs, des régions parcourues (Corse, Algérie, Italie), la Méditerranée étant un puzzle de civilisations. A son image, l’œuvre de notre écrivain est un kaléidoscope où se juxtaposent des représentations contradictoires. 

3.     La dimension idéologique et politique : « Le Midi monte, le Midi monte… »

Quel rôle Daudet a-t-il joué – consciemment ou non – dans ce qu’on a pu appeler « la Renaissance du Sud » ? Son œuvre illustre une nouvelle approche du régionalisme littéraire (en français) mais quelle place celle-ci fait-elle aux parlers locaux, à la langue et à la littérature provençale ?
Daudet interroge aussi la place politique du Midi en France à travers l’évocation d’hommes comme Gambetta, l’analyse d’une parole publique spécifique aux méditerranéens, la question de la colonisation (Algérie), etc. 
Mais la Méditerranée est aussi un espace en pleine transformation. La question de M. Chèbe dans Fromont jeune et Risler aîné (1874) : « Eh bien, mon petit, ça va-t-il comme vous voulez, ce canal de Suez ? » montre l’actualité du débat. Daudet a-t-il eu une vision politique et sociale du monde méditerranéen à son époque ?

4.   Une représentation romanesque du monde méditerranéen

On sera sensible aux perspectives historiques : résurrection d’une Provence disparue et/ou voie d’effacement. Daudet a participé à la création d’une représentation mythique du Midi qui a été reprise et diffusée sous forme de stéréotypes valorisants ou négatifs : caricature ou sacralisation du folklore, le Midi menteur, hâbleur, etc. En réponse à la question de la race et du milieu posée par Hippolyte Taine, Daudet valorise les races et la culture latine dont il oppose la clarté aux brumes du Nord. 

5.    Nul n’est prophète en son pays 

On pourra étudier la réception de Daudet dans le Midi de son temps et aujourd’hui, s’intéresser à l’histoire de la mémoire de Daudet dans le Midi (histoire du Moulin, des fêtes de Fontvieille), présence des rues, des collèges et des lycées. Des écrivains et cinéastes ont repris ou adapté certaines de ses représentations. (Jean Aicard, Maurin des Maures, Pagnol, etc.).

Le colloque aura lieu les vendredi 14 et samedi 15 juin 2024 à la Bergerie du château de Montauban, à Fontvieille (Bouches-du-Rhône). Il se déroulera en présentiel et aussi en visioconférence.

Les communications orales ne devront pas dépasser 20/25 min ; elles seront publiées dans la revue à comité de lecture Le Petit Chose, dont les anciens numéros se trouvent sur Gallica.

Les propositions sont à envoyer jusqu’au 8 janvier 2024 avec un court C.V. et une présentation en quelques lignes à :

Anne-Simone Dufief : anne.dufief@univ-angers.fr
Romain Enriquez romain.enriquez@yahoo.com
Bernard Urbani : b.urbani@wanadoo.fr